Joueb.com
Envie de créer un weblog ?
ViaBloga
Le nec plus ultra pour créer un site web.
Débarrassez vous de cette publicité : participez ! :O)
hétéroclite, écoute le temps, la tête dans les étoiles, les pieds par dessus

 

 




211 Une Légende de Fugen-Bosatsu
Lafcadio Hearn

Source : Internet Archive : Universal Access to all Knowledge
Traduction : Happy.


Lafcadio Hearn (Koizumi Yakumo 小泉八雲)
(1850-1904)

Reflets
(Shadowings, 1900)

II.   Une Légende de Fugen-Bosatsu (1)

 

IL était une fois un prêtre très vieux et très savant du nom de Shôku Shônin, qui vivait dans la province de Harima. Pendant de nombreuses années il médita chaque jour sur le chapitre de Fugen Bosatsu [le Bodhisattva Samantabhadra] du Sûtra du Lotus de la Bonne Loi ; et il avait coutume de prier, chaque matin et chaque soir, qu’il lui soit un jour permis de voir Fugen Bosatsu sous l’aspect d’un être vivant, et sous la forme décrite dans le texte sacré. (2)

Un soir qu’il récitait le Sûtra, une torpeur l’envahit ; et il s’endormit appuyé sur son kyôsoku. (3) Puis il rêva ; et dans son rêve une voix lui dit que, pour voir Fugen Bosatsu, il devait se rendre chez une certaine courtisane, connue sous le nom de « Yujô-no-Chôja », (4) qui vivait dans la ville de Kanzaki. Dès son réveil, il résolut d’aller à Kanzaki ; — et, hâtant le pas autant qu’il put, il parvint à la ville dans la soirée du lendemain.

Quand il entra dans la maison de la yujô, il y trouva déjà réunie une nombreuse assemblée — de jeunes hommes de la capitale, surtout, que la renommée de la beauté de la femme avait attirés à Kanzaki. Ils festoyaient et buvaient ; et la yujô jouait d’un petit tambour à main (tsuzumi), qu’elle maniait très habilement, et chantait une chanson. La chanson qu’elle chantait était une vieille chanson japonaise sur un célèbre sanctuaire de la ville de Murozumi, et les paroles en étaient les suivantes : —

Dans la fontaine d’eau sacrée (5) de Murozumi en Suwô,
Quand bien même aucun vent ne souffle,
La surface de l’eau ondoie sans cesse.

La douceur de sa voix emplissait tout le monde d’étonnement et de ravissement. Tandis que le prêtre, qui avait pris place à l’écart, écoutait émerveillé, la jeune fille fixa soudain ses yeux sur lui ; et dans le même instant, il la vit changer de forme et prendre celle de Fugen Bosatsu, et émettre depuis son front un faisceau de lumière qui semblait percer au-delà des limites de l’univers, et chevaucher un éléphant à six défenses blanc comme la neige. Et toujours elle chantait — mais maintenant la chanson aussi s’était transformée, et voici les paroles qui parvinrent aux oreilles du prêtre : —

Sur la Vaste Mer du Renoncement,
Bien que des Six Désirs et des Cinq Corruptions jamais le vent ne souffle,
Pourtant de cet abysse toujours la surface s’emplit
Des ondoiements de l’Accession à la Réalité-en-Soi.

Ébloui par le rayon divin, le prêtre ferma les yeux : mais à travers ses paupières, il voyait toujours distinctement la vision. Quand il les rouvrit, la vision avait disparu : il ne vit plus que la jeune fille avec son tambour à main, et n’entendit plus que sa chanson sur l’eau de Murozumi. Mais il constata que toutes les fois qu’il fermait les yeux, il voyait Fugen Bosatsu sur l’éléphant aux six défenses, et il entendait le chant mystique de la Mer du Renoncement. Les autres personnes présentes ne voyaient que la yujô : elles n’avaient pas vu l’apparition.

Puis la chanteuse disparut soudainement de la salle du banquet — nul ne sut dire quand ni comment. Dès ce moment, les réjouissances cessèrent ; et la mélancolie succéda à la joie. Après avoir vainement attendu et cherché la jeune fille, la compagnie se dispersa dans une grande tristesse. Le prêtre, troublé par les émotions de la soirée, partit le dernier de tous. Mais à peine avait-il passé la porte que la yujô parut devant lui et lui dit : — « Ami, ne parlez encore à personne de ce que vous avez vu cette nuit. » Et sur ces mots, elle disparut, — laissant l’air embaumé d’un délicieux parfum.

*
*   *

Le moine qui a consigné la légende ci-dessus la commente ainsi : — La condition d’une yujô est basse et misérable, car elle est condamnée à servir les passions des hommes. Qui donc pourrait imaginer qu’une telle femme puisse être la nirmanakaya, l’incarnation d’un Bodhisattva. Mais nous devons nous rappeler que les Bouddhas et les Bodhisattvas peuvent apparaître dans ce monde sous d’innombrables formes ; allant, pour exercer leur divine compassion, jusqu’à choisir les formes les plus humbles ou les plus méprisables quand ces formes peuvent leur servir à mener les hommes dans le vrai chemin, et à les sauver des périls de l’illusion.


NOTES :

(1) Puisé dans le vieux livre de contes Jikkun-shô.

(2) Ce désir fut probablement inspiré au prêtre par les promesses consignées dans le chapitre intitulé « L’Encouragement de Samantabhadra » (voir la traduction par Kern du Saddharma Pundarîka dans les Livres sacrés de l’Orient (Sacred Books of the East), — pp. 433-434) : « Alors le Bodhisattva Mahâsattva Samantabhadra dit au Seigneur : “ ... Quand un prédicateur qui s’applique à ce Dharmaparyâya partira en promenade, alors, Ô Seigneur, je monterai un éléphant blanc à six défenses, et me rendrai à l’endroit où se promène ce prédicateur, afin de protéger ce Dharmaparyâya. Et quand ce prédicateur, en s’appliquant à ce Dharmaparyâya, omettra ne serait-ce qu’un seul mot ou une seule syllabe, alors je monterai l’éléphant blanc à six défenses, et je ferai voir mon visage à ce prédicateur, et je lui répéterai ce Dharmaparyâya en entier. ” » — Mais ces promesses se réfèrent à « la fin des temps. »

(3) Le Kyôsoku est une sorte d’accoudoir rembourré, ou de fauteuil, sur lequel le prêtre appuie son bras lors de la lecture. L’utilisation d’un tel accoudoir ne se limite pas, cependant, au clergé bouddhiste.

(4) Une yujô, aux jours anciens, était une chanteuse aussi bien qu’une courtisane. Le terme « Yujô-no-Chôja », dans ce cas, signifierait tout simplement « la première (ou la meilleure) des yujô ».

(5) Mitarai (ou Mitarashi) est le nom spécial donné au bassin, ou à la fontaine — en pierre ou en bronze — placé devant les sanctuaires Shintô afin que le fidèle puisse se purifier les lèvres et les mains avant de faire la prière. Les bassins bouddhiques ne sont pas nommés ainsi.


happy   dans   Nippon    Samedi 11 Septembre 2010, 14:12

 



Quau canto,
soun mau encanto
D’ici et d’ailleurs Qui chante son mal,
l’enchante

 


bienvenue
dans ce
joyeux
bric-à-brac
Nom d'utilisateur
Mot de passe

Mot de passe oublié ?

 
je vais aux routes
de mon cœur,
je suis la vision
de mes yeux !
 
sommaires
des rubriques
de bric
et de broc
 
hier, sans nostalgie
demain, sans projet
aujourd'hui,
je suis
To translate
from and to
various
languages :



 

 

 

qui suis-je ?
Merci à Mephisto Lessiveur pour les images